ESSO : EST-CE LE PÉTROLE POUR LE CLIMAT ?

Jancovici
30 min readDec 10, 2020

par Michel LEPETIT Président de Global Warning
Published on December 8, 2020 : https://www.linkedin.com/pulse/esso-est-ce-le-p%25C3%25A9trole-pour-climat-michel-lepetit/?trackingId=u8JjTSGcSlC%2By6fbX3miaw%3D%3D

1974 : PETROLE PROGRES N°100 — L’énergie : un recyclage à l’échelle planétaire aujourd’hui : le circuit complet demande un bon nombre de millions d’années

L’histoire de la science du changement climatique est un vaste champ d’étude [1]. Au cours du XXe siècle, l’industrie du pétrole a suivi l’avancement de la question scientifique d’une modification anthropique du climat, due à un éventuel déséquilibre du bilan planétaire des gaz à effet de serre [2]. Cette question d’histoire des sciences est dorénavant un sujet économique et social sensible, aux enjeux juridiques et financiers croissants [3].

L’auteur, historien amateur, s’est déjà exprimé sur certains évènements et documents de cette histoire. Un texte important est l’article très cité The Historical Root of our Ecological Crisis du célèbre médiévistes Lynn White (1907–1987) spécialiste de l’histoire des techniques. Dès 1966 [4], White y évoque explicitement le changement climatique [5], alors qu’il est déjà plus qu’un grand historien, professeur à l’Université de Californie, en contact avec une large communauté scientifique.

Un autre texte extraordinaire — évoqué plus loin dans ce billet — est le rapport Energy in the Future, écrit par l’ingénieur Palmer C. Putnam en 1953 [6]. Putnam, témoignant d’échanges inquiets avec le monde scientifique américain à l’occasion de la préparation de ce brillant rapport sur les perspectives énergétiques mondiales à l’horizon 2000, s’inquiète au sujet des émissions de CO2 qu’il anticipe, et de leurs éventuelles conséquences : « Il faut qu’on sache ! »[7]

PÉTROLE PROGRÈS

Pétrole-Progrès était le magazine francophone de communication institutionnelle du Groupe ESSO en France. Edité jusqu’en 1985, la série comporte 144 numéros, souvent d’une vingtaine de pages bien illustrées, publiés généralement à une fréquence trimestrielle, et touchait un lectorat estimé à 200 000 lecteurs en 1957.

Objectif du présent billet

L’objet du présent article est le résultat d’un travail d’archives sur la base d’une analyse de 87 numéros de la revue d’ESSO postérieurs au numéro 27 (1955). Dans le cadre d’une Histoire globale de l’énergie, il semble intéressant d’identifier dans ces documents d’archive de la communication d’ESSO en France, c’est-à-dire du groupe EXXON, les références [8] au changement climatique, les allusions à des sujets connexes, voire les absences de référence. Les préoccupations environnementales qui sont bien visibles dans des articles de la revue dès la fin des années 1950 mettent la question de la combustion des ressources fossiles — et donc d’abord la « pollution atmosphérique » — sur le devant de la scène, sans que la question de l’effet de serre et du climat soit systématiquement évoquée. Chaque article retenu est éventuellement précédé d’un commentaire [Commentaire GW …]. Ayant un objectif pédagogique, la revue a souvent recours au format du conte, ou encore du dialogue romancé, qui évite la prise de position tranchée. Le présent billet se termine par la publication intégrale de l’article « Effet de serre, Energies fossiles, Energies nouvelles » de Pétrole-Progrès N°137 (printemps 1983). Ce dernier article est entièrement consacré à la question climatique, et est sans ambiguïté dans ses conclusions. (Il en est proposé une traduction pour les lecteurs anglophones). Le GIEC est créé 5 ans plus tard.

PÉTROLE PROGRÈS N° 32 (1957)

[Commentaire GW : référence explicite au rapport Putnam (voir introduction), dont un graphique ; sans évocation de la question climatique]

D’ici l’an 2000 — Apologue économique (pages 2–5)

( …) A ce sommet de son exposé, Candide sentit le besoin d’être appuyé par une autorité et il alla tirer des rayons de la bibliothèque un exemplaire fort élégamment relié du rapport Putnam établi par la Commission américaine de l’Energie atomique. « D’après ce rapport, la dépense cumulée d’énergie entre 1950 et 2000 serait au minimum de 480 milliards de tonnes et au maximum de 950 milliards. Vous voyez que mes hypothèses restent dans des limites reconnues. Or ne pouvons-nous nous inquiéter de savoir comment ces besoins seront satisfaits ? Le charbon et le pétrole s’épuiseront un jour, m’assure-t-on, et les meilleurs théoriciens s’accordent à dire que les autres sources d’énergie, vents et marées, chute d’eau, et le soleil lui-même ne nous fourniront qu’un appoint. (…)

PÉTROLE PROGRÈS N°33 (1957)

[Commentaire GW : montée des craintes environnementales ; sans évocation de la question climatique]

La protection de la nature (pages 2–4)

Les moyens mis à la disposition de l’homme moderne lui donnent un tel pouvoir de transformer la Nature, et en de nombreuses régions le danger de modifications catastrophiques est devenu si grand, qu’on ne s’étonnera pas de voir « Pétrole-Progrès » donner toute son importance à l’article qui suit. M. J. Guilloteau, directeur du Bureau Interafricain des Sols, y examine le cas de « l’homme contre la Nature », et les moyens de parer à ses déprédations et dégradations, parfois involontaires. Car si les « esclaves mécaniques » de l’homme, utilisés « à tort et à travers », peuvent aggraver dans des proportions inouïes le mal causé par des millénaires de méconnaissance envers la Nature, ils peuvent aussi contribuer efficacement à réparer les dommages, anciens ou récents, qui affectent le sol de notre planète, sol nourricier dont dépendra toujours la vie même des humains …

Nul conte n’illustre mieux la façon dont l’Homme peut se ruiner en ruinant la Nature, que celui de la poule aux œufs d’or. Déjà, peut-être, au temps du bon La Fontaine, certaines méthodes d’exploitation des richesses naturelles, des forêts vraisemblablement, choquaient et inquiétaient les naturalistes, d’où cet apologue. (…)

Parce que nous avons cru tout savoir, tout posséder de ses secrets et pouvoir nous servir, sans frein, de tout ce qu’elle a mis croyons -nous, à notre seule disposition, nous avons beaucoup détruit et très certainement compromis notre avenir. Ne jouons plus aux apprentis sorciers, nous pourrions libérer des forces qu’il nous serait impossible de contrôler. Aimons, si possible, la Nature, pour ce qu’elle nous donne et peut nous apporter ; nous la comprendrons mieux ainsi. En tout cas, respectons et protégeons-la du mieux que nous pouvons. Ce faisant, non seulement nous assurerons notre avenir et celui de nos enfants, mais encore celui d’une multitude d’autres hommes vers qui nous ne pouvons faire de plus beau geste de solidarité humaine. — J. Guilloteau

PÉTROLE PROGRÈS N°64 (1965)

[Commentaire GW : évocation de l’effet de serre ; sans évocation de la question climatique]

Le gaz carbonique comme engrais (page 30)

Dans les serres les plantes vivent dans de bonnes conditions de lumière, de chaleur et d’humidité. Mais quand le temps est froid il faut fermer les ouvertures pour diminuer la perte de chaleur et la faible quantité d’air qui pénètre ne fournit plus assez de gaz carbonique pour le développement du tissu végétal. Les botanistes ont eu, bien entendu, l’idée de faire un apport artificiel de gaz carbonique pour maintenir dans les serres le taux de 0,03 pour cent qui existe généralement à l’extérieure. Mais, au cours de leurs expériences, ils ont constaté qu’un supplément de gaz carbonique jouait dans certains cas un rôle fertilisant. L’amélioration de la croissance des plantes se poursuivait jusqu’à ce que la concentration de gaz carbonique ait atteint 0,1 pour cent. (…)

PÉTROLE PROGRÈS N°84 (1970)

[Commentaire GW : les 43 pages du magazine sont consacrées à la question environnementale « Homme — nature » ; seul le dialogue « philosophique » (Le jardin des plantes — page 28) évoque -gauchement- la question climatique]

1970 … Année de l’environnement ! (Editorial)

Pétrole-Progrès ne pouvait rester à l’écart de ce grand mouvement qui porte aujourd’hui tant de nos compatriotes à s’intéresser à des questions trop négligées il y a encore peu de temps et dont ils ignoraient parfois même qu’elles se posaient à l’humanité. (…) La science nous a permis d’analyser les causes productrices de ces deux genres d’états. La loi tend, dans la mesure du possible, et de leur sagesse, à empêcher les hommes de provoquer les agressions ou les nuisances dont ils souffrent, au moins lorsque la science en a montré la nocivité. Mais la science a parfois bien des difficultés à faire admettre ses découvertes lorsque les avertissements qu’elle lance sont de nature à bousculer notre confort intellectuel ou physique. Il existe en effet, très souvent, une opposition entre cette notion de « confort », purement subjective, qui comportent des sensations agréables ou des satisfactions relatives, et celle du « bien être » recouvrant à notre sens le principe d’une harmonie naturelle et d’un équilibre qui ne doivent rien à la recherche artificieuse de l’esprit humain. Les agressions et les nuisances qui troublent notre environnement menacent toute la planète. (…) Aussi, le présent numéro de Pétrole-Progrès traitera donc essentiellement de la pollution de l’air et de l’eau, ainsi que des agressions du bruit (…) Le monde entier se trouve devant l’impérieuse nécessité de reconstituer un Capital-Nature qu’il a largement entamé. L’industrie n’est pas, pour ce qui la concerne, plus coupable que le législateur. Ensemble, nous sommes tombés dans le piège du progrès technique sans en mesurer toujours les conséquences lointaines. C’est donc à un effort commun que nous sommes conviés, auquel nous devons répondre dans la pleine conscience de nos devoirs à l’égard des générations futures. Il est réconfortant de penser que nous nous trouvons ici devant une tâche qui, pour une fois, ne divise pas mais rassemble les peuples.

Le Groupe de la Standard Oil Company (New Jersey), auquel Esso Standard S.A.F. est affiliée, est conscient de l’impérieuse nécessité de protéger l’environnement de son entreprise, les hommes qui y travaillent et le public en général. Il considère qu’il est indispensable d’établir une règlementation pour prévenir la pollution de l’air et de l’eau, et envisage une large collaboration avec les pouvoirs publics dans ce but. Avec le pragmatisme qui caractérise tout groupe industriel, il souhaite que les mesures à prendre combinent l’efficacité avec le coût le plus raisonnable pour le consommateur ; qu’elles soient adaptées aux possibilités pratiques en matière de progrès technique ; qu’elles traient de la même manière, à égalité de nuisance, les diverses sources de pollution à combattre ; que les contrôles à installer soient aussi proches que possible des lieux de pollution pour qu’ils s’exercent conformément à des besoins réels et non en fonction de décisions élaborées par une autorité lointaine, ignorante des données locales. Dans le cadre d’une telle réglementation, le groupe est disposé à réorienter ses techniques opératoires, et même à modifier la nature de ses produits pour éliminer dans toute la mesure du possible les émissions polluantes et autre effluents nocifs. Il est, de plus, disposé à collaborer avec d’autres groupes et avec les pouvoirs publics, pour la mise au point de techniques et de produits destinés à prévenir la pollution ou à y porter remède en cas d’accident imprévisible.

Dans le cas de découvertes faites à ce sujet par ses propres laboratoires, il est prêt à les rendre publics et, le cas échéant, à les partager à des conditions raisonnables avec les industries ou les organismes intéressés. (…)

L’air que nous respirons (p 10 ; par Michel Grenon)

(…) Ensuite viennent les composés carbonés. Le dioxyde de carbone CO2 ou gaz carbonique est, avec l’eau, le produit normal des combustions de tous composés organiques ; c’est ainsi qu’en France, ce sont 300 millions de tonnes de CO2 qui sont émises annuellement. Mais quand les quantités d’oxygène comburant ne sont pas suffisantes, il se produit une combustion incomplète ; il en résulte non plus du dioxyde, mais du monoxyde de carbone ou CO, particulièrement toxique parce que l’hémoglobine du sang fixe l’oxyde de carbone de préférence à l’oxygène de l’air et devient de la carboxyhémoglobine, réduisant d’autant le rôle transporteur d’oxygène joué par le sang dans l’organisme ; à forte concentration, le monoxyde de carbone constitue donc de la sorte un poison mortel.

(…) Le second exemple de pollution est celui des automobiles. Peut être est-ce celui qui nous est devenu le plus familier, tant à cause de l’importance croissante de ce mode de transport que lors de certaines campagnes de presse à l’affût du sensationnel ; il est aussi, est-il besoin de le dire, celui auquel on pense le plus naturellement … quand on se trouve environné d’odeurs et de fumées au beau milieu d’un embouteillage ! La combustion dans les cylindres n’étant jamais complète, on trouve donc en plus du gaz carbonique et de l’eau — heureusement les plus abondants — de l’oxyde de carbone et certains dérivés oxygénés des hydrocarbures comme les aldéhydes et les peroxydes ; puis toute une série d’hydrocarbures (…)

Le jardin des plantes — dialogue de deux amateurs sur le bon usage de la nature (page 28 ; par Pierre Delachaume)

(…)

- Encore des destructions de site, des terroirs dépecés par les travaux routiers, des tonnages de détritus, dont les autorités ne sauront plus que faire ! Lancés inexorablement sur la voie du développement, nous ne pouvons donc plus faire machine arrière !

- Il faut s’adapter, c’est la loi de la vie …

- Trente-six tonnes d’oxygène brûlées par un Boeing pour faire Paris-New-York ; l’anhydride sulfureux rejeté à longueur de journée et transformé aussitôt en vitriol ; le gaz carbonique qui s’accumule et, par effet de serre, accroît la température ; ce qui fait fondre les glaciers, amoncelle la vapeur d’eau en nuages, qui cacheront un jour le soleil, et nous amèneront ainsi une nouvelle période glaciaire par extinction du calorique ; destruction de la couche d’ozone protectrice en haute atmosphère par combinaison avec les milliers de tonnes d’hydrogène échappées des fusées spatiales ; mutations désastreuses et proliférations malignes induites par l’ingestion permanente de pesticides, poussières industrielles, défoliants, excitants, tranquillisants ; que sais-je encore … Le piétinement, vous dis-je, le piétinement !

- Il faut être bien sûr de son fait pour apprécier à sa juste valeur la nocivité relative des interventions humaines. Il n’a pas été possible, par exemple, de prouver absolument, judiciairement, la responsabilité de la thalidomide dans l’apparition de monstruosités phocomèles et, inversement, le risque de cancers par ingestion de progestatifs de synthèse ; tout au plus peut-on admettre, statistiquement, une relation ou une absence de relation entre les deux phénomènes. Aucune des catastrophes évoquées n’est vraiment à craindre d’un point de vue scientifique. C’est rendre un méchant service à la nature que d’exagérer les périls dont on la croit menacée. Parfois détruire, souvent construire, toujours servir : ce serait bien la devise de l’humanité. Je crois au pouvoir d’adaptation fantastique de l’homme …

- … mais jusqu’à certaines limites seulement !

- Nos efforts doivent tendre à la préservation de l’espèce humaine ; et la notion d’aménagement doit remplacer celle de conservation du milieu naturel. Pourquoi pas ? Qui dit mieux ? C’est la loi du progrès …

- … Je vous entends, cher monsieur. Mais il se fait tard, nous nous reverrons, j’espère. Partez-vous à la mer cet été ?

- Non, cet hiver, en montagne, aux Arc — 1 600.

- Le ski, alors ?

  • Pas tellement. Les promoteurs de la station organisent — et je me dois d’y assister — un certain colloque sur l’environnement …

PÉTROLE PROGRÈS N°87 (1971)

[Commentaire GW : évocation de la question climatique en reprenant les débats d’un grand colloque de prospective de 1968, dont les actes ont été archivés[9]]

Mégawatts — Mégavolts — L’énergie en France dans 50 ans (pages 2–6 ; par R. Leygonie)

Prévoir notre faim d’énergie (page 3)

« Tout en nous et autour de nous n’est qu’énergie en cours de transformation » . — Louis Armand

Pourquoi envisager une prospective à long terme de l’énergie ?

Qu’on me pardonne le long préambule que je viens d’infliger au lecteur ! J’espère avoir acheté, au prix de sa patience, le droit de parler, sans faire sourire, de prévision à 50 ans. La citation ci-dessus de Louis Armand met l’énergie à sa juste place : la première, quand il s’agit de prévoir l’avenir du monde sur le plan du développement industriel et du niveau de vie. Aussi ne faut-il pas s’étonner que le Colloque International sur les Techniques Avancées et l’Aménagement du Territoire, qui s’est tenu en 1968 à Gif-sur-Yvette et le dernier en date en France sur ces questions, ait consacré une longue séance au problème de l’énergie en France au début du XXIe siècle. Ce colloque réunit un certain nombre de personnalités de grande compétence, chargés de lourdes responsabilités à l’échelle nationale, et cela donne à leurs idées une autorité incontestable. Disons toutefois, sans manquer au respect qu’on leur doit, que leurs propos sont plutôt des opinions particulières, des réflexions basées sur une longue expérience et non des résultats d’études en profondeur.

Il est vrai que le rapporteur avait préparé pour le colloque un remarquable document d’introduction. L’ensemble des idées émise constitue un saisissant tableau, remarquablement cohérent, de ce que pourrait être dans 50 ans le visage énergétique de la France. Nous allons en présenter les grandes lignes, en laissant, bien entendu, aux auteurs la responsabilité de leurs affirmations. (…)

Et l’environnement (page 6)

Ce terme de « franglais », remarquablement acclimaté dans notre langue depuis peu d’années, n’a guère été utilisé dans l’exposé ci-dessus. Et cependant, beaucoup des vues exposées sont influencées ou même dictées par des considérations de sauvegarde de l’environnement. Il faut, à ce propos, rendre hommage aux participants du Colloque : à l’époque où ils ont tenu leurs assises, les nuisances n’étaient guère encore qu’une préoccupation d’experts, et non celle du grand public. Le sujet n’était pas encore à la mode. Cependant, la lutte contre les nuisances du monde moderne n’a pas été sous-estimée au cours des débats. Rappelons seulement la question de la pollution thermique des cours d’eau. Une autre grave préoccupation est celle des déchets radioactifs qui deviendront fort abondants dans 30 ou 50 ans : une suggestion très futuriste est de les envoyer sur la face cachée de la Lune, du moins si des solutions terrestres d’une sécurité absolue ne sont pas trouvées d’ici là. On aimerait connaître à ce sujet l’avis de Neil Amstrong et de quelques autres visiteurs de l’astre des nuits.

Une autre préoccupation se fait jour : l’utilisation massive de combustibles fossiles ne va-t-elle pas dangereusement enrichir l’atmosphère en gaz carbonique ? A cette apocalyptique question, il y a la réponse des pessimistes qui prévoient la fonte des glaces polaires et la montée du niveau des mers (par le fameux « effet de serre »). Il y a aussi les optimistes qui font confiance à la bonne nature ; l’enrichissement en CO2 favorisera, disent-ils, la fonction chlorophyllienne et l’équilibre se maintiendra. Bien entendu, il n’était ni dans les intentions, ni dans les possibilités du Colloque de Gif-sur-Yvette d’apporter une réponse à cette angoissante interrogation. Mais concluons : les problèmes d’environnement que nous connaissons aujourd’hui devront avoir été résolus en 2020, sinon ce sera la catastrophe dont les habitants de Los Angeles ont un avant-goût dès aujourd’hui. Et gageons qu’en 2020 il se posera d’autres problèmes que nous ne soupçonnons pas aujourd’hui !

PÉTROLE PROGRÈS N°98 (1974)

[Commentaire GW : évocation du rapport Meadows, publié en 1972 ; évocation gauche de la combustion des énergies fossiles ; article de cette revue évoquant la création de l’IPIECA (International Petroleum Industry Environment Conservation Association), association internationale de l’industrie pétrolière pour la protection de l’environnement]

Science et conscience écologique (pages 20–26)

(…)

- Et pourtant, il y a l’avertissement du Club de Rome et l’étude Meadows. Je sais, Maxime, que vous êtes sceptique à ce sujet. Mais ne devrait-on pas orienter la recherche vers les problèmes dont la solution conditionne la survie même de l’humanité ?

  • On n’a pas attendu l’étude Meadows pour savoir que les ressources naturelles de la terre sont limitées. Mais les ressources intellectuelles de l’homme le sont-elles autant ? L’étude Meadows nous montre jusqu’à des dates lointaines l’évolution possible de la population, des ressources minérales, des investissements industriels, du niveau de pollution … A mon avis une courbe manque, qui est celle des connaissances scientifiques et techniques de l’humanité. Elles aussi croissent, et ceci sans créer de pollution ni épuiser les ressources naturelles. J’ai noté à ce sujet ce qu’a dit John Diebolt aux Rencontres Internationales du Ministère de l’Économie et des Finances en juin 1972 : « La connaissance scientifique se développe elle aussi, à un rythme exponentiel qui augmente également de 4% à 5% par an. Si cela continue, d’ici que le bébé d’aujourd’hui ait 80 ans, environ 97% de la connaissance scientifique qui existera dans le monde sera faite d’éléments encore inconnu aujourd’hui. (…)
  • Autre point important : Je pense que le retour à la science et à l’esprit scientifique sera le meilleur rempart contre les assauts de l’irrationnel que nous subissons aujourd’hui. Ainsi, la crainte des pollutions atteint chez certains une dimension apocalyptique et nourrit, à l’approche de l’an 2000, une terreur digne de l’an 1000. Pour eux, le pire est nécessairement fatal, même s’il contredit les faits scientifiques les mieux établis. Prenons un exemple : on lit partout que la teneur en oxygène va baisser dangereusement à cause des combustions de gaz, de pétrole, de charbon.
    Un calcul à la portée d’un lycéen prouve que cette crainte est absurde. (…)

PÉTROLE PROGRÈS N°100 (1974)

[Commentaire GW : évocation du rapport Meadows, publié en 1972 ; évocation gauche de la combustion des énergies fossiles]

Raffiner toujours en l’an 2000(pages 16–21 ; par R. Leygonie)

(…) L’hydrogène, c’est le recyclage parfait dont rêvent les écologistes. Certes, les combustibles fossiles aboutissent aussi à un recyclage : celui par le gaz carbonique transformé en matière végétale par la fonction chlorophyllienne. Mais combien il est lent ! Il nous laisse le temps d’épuiser nos ressources en matières énergétiques fossiles ! Car il faut des millions d’années pour faire ou refaire du pétrole, du gaz, du charbon. Un recyclage plus rapide serait de brûler nos forêts, mais, au sens propre du mot, elles ne feraient pas long feu ! L’homme, grâce à la fusion thermonucléaire ou à l’énergie solaire domestiquée, combinée à la production massive d’hydrogène, puisera son énergie à la source même de l’univers. Il ne sera plus le chiffonnier de la Création, vivant de ces déchets géologiques que sont les combustibles fossiles, à la fois polluants et épuisables. On assistera à la réconciliation totale de l’industrie humaine avec la nature, condition essentielle de la survie de l’humanité.

PÉTROLE PROGRÈS N° 137 (1983)

[Commentaire GW : l’article « Effet de serre, Energies fossiles, Energies nouvelles » est sans signataire]

Effet de serre, Energies fossiles, Energies nouvelles

« L’homme ne peut prédire le futur, mais il peut l’inventer » Dennis Gabor (1)

Le gaz carbonique de l’atmosphère tend à réduire l’émission vers l’espace du rayonnement infrarouge de la surface terrestre. Si la concentration en gaz carbonique s’accroît, la température au niveau du sol doit logiquement croître. C’est l’effet de serre. Or cette concentration, actuellement à 340 parties par million, était à 280 au milieu du siècle dernier et a augmenté de 15% depuis 1900. Les causes de cet accroissement sont, d’une part l’usage des combustibles fossiles, d’autre part la déforestation, notamment en zones tropicales, les parts relatives de ces deux causes étant encore mal connues. Par ailleurs, une partie importante du gaz carbonique émis dans l’atmosphère est absorbée par la mer.

Un doublement de la concentration en gaz carbonique de l’atmosphère peut être attendue entre le milieu et la fin du siècle prochain. Selon divers modèles atmosphériques établis récemment, les conséquences pourraient en être un réchauffement général (1,5° à 3°C) pouvant aller jusqu’à 10°C dans les régions polaires. Les effets climatologiques et socio-économiques pourraient alors en être immenses : fusion des glaces polaires, montée du niveau de la mer, sécheresses persistantes dans les zones actuellement bien arrosées, pluies sur des zones aujourd’hui arides.

Scénario catastrophe ? Mais il faut reconnaître d’abord que bien d’autres facteurs que la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère doivent influer sur le climat : ainsi, depuis 1940, la température moyenne sur la terre a baissé de 0,4°C, alors que la concentration en gaz carbonique augmentait. Et puis, si l’homme ne peut prédire le futur, il peut l’inventer ! C’est ce que rappelait Edward David, président d’Exxon Research and Engineering Co. lors de son intervention au cours d’un symposium consacré à la climatologie en octobre 1982.

Pour inventer ce futur, l’homme dispose de la science et de la technique, du guide que constitue le marché, et aussi de l’action politique. La prévision ne consiste pas à extrapoler le présent, mais à bâtir plusieurs scénarios vraisemblables. Il faut entreprendre des recherches dont les résultats soient applicables au plus grand nombre possible de ces scénarios.

Le programme d’Exxon comporte des études à très long terme et c’est ainsi que le Groupe, avec d’autres sociétés pétrolières, s’intéresse au problème du gaz carbonique, en participant aux recherches sur ce sujet. Par exemple, des navires pétroliers du Groupe ont systématiquement prélevé de l’air entre le golfe du Mexique et le golfe Persique pour y doser le gaz carbonique. Tout le monde admet qu’une grande « transition énergétique » est commencée avec le passage progressif des énergies fossiles à des énergies renouvelables. Cela aura un effet majeur sur les émissions de gaz carbonique. Déjà des facteurs favorables jouent. L’Agence internationale de l’énergie signale que pour accroître d’un point la production de biens et services dans le monde libre, il faut 16% de moins d’énergie et 26% de moins de pétrole qu’il y a 10 ans. Exxon a abaissé de 20% la consommation en combustible de ses raffineries (2) (et le double d’ici l’an 2000).

Ed. David admet comme raisonnables trois hypothèses concernant les facteurs qui peuvent influer sur l’évolution future de la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère :

- Continuation de la croissance économique, principalement dans le tiers-monde, avec doublement en 50 ans de la population mondiale.

- Préférence donnée aux énergies les moins chères, au besoin parfois par recours aux ressources locales en combustibles (déchets agricoles et forestiers par exemple).

- Domination maintenue des combustibles liquides dans les transports, ce qui pourrait entraîner vers l’an 2000 une industrie des « combustibles de synthèse » à partir des sables et schistes bitumineux, et du charbon.

Sur la base d’un accroissement mondial annuel des consommations énergétiques de 1% durant 50 ans, principalement à cause de la croissance dans le tiers-monde, Exxon a calculé que le doublement des teneurs de l’air en gaz carbonique se produirait vers la fin du XXIe siècle, avec altération climatique possible dès 2050.

Pour une même quantité d’énergie utilisable, la fabrication et l’utilisation des combustibles de synthèse génèrent plus de gaz carbonique que la production et l’utilisation du pétrole, mais leur remplacement par un supplément de pétrole ne retarderait que de 5 ans la date du doublement. Dans ces estimations, on n’a supposé aucune amélioration des techniques actuelles de production dévoreuses d’énergie, et on n’a pas tenu compte de l’avènement de l’ « ère informatique » : ces progrès contribueront à réduire les émissions de gaz carbonique. L’homme a donc encore le temps d’accumuler les données scientifiques pour faire face avant que le problème ne devienne aigu.

Ces vues rejoignent celles de l’IIASA (Institut International pour l’Etude des Systèmes). Dans un rapport de 1981 cet institut décrivait la transition des énergies fossiles aux énergies renouvelables, signalait le problème du gaz carbonique, et insistait sur la nécessité d’une importante recherche à très long terme pour le résoudre. L’histoire montre qu’il faut au moins un demi-siècle pour qu’une nouvelle source d’énergie assure 50% de la consommation totale.

Exxon, dans ses recherches, travaille à la fois pour le court et le long terme. Ainsi ses chercheurs améliorent l’efficacité des raffineries (court terme) et étudient des procédés de fractionnement d’avant-garde ne faisant pas appel à la distillation consommatrice d’énergie, donc évitant la production de gaz carbonique (long terme). Ils ont aussi étudié bien des possibilités pour les carburants synthétiques : pyrogénation des schistes ; liquéfaction directe du charbon ; méthanisation en une étape du charbon ; génération du « gaz de synthèse » (mélange oxyde de carbone et hydrogène) à partir de charbon, de lignite, du gaz naturel de régions trop éloignées pour une valorisation classique ; conversion du gaz de synthèse en carburants et produits chimiques.

Certes, les procédés envisagés pour fabriquer les carburants de synthèse se sont révélés beaucoup plus coûteux que prévus. Ce fait, joint à la stabilité des prix du pétrole brut, a ralenti leur progrès. Mais il faut les repenser en terme de consommation d’énergie. Aujourd’hui, dans ces procédés, seulement 60% du carbone de la matière première se retrouve dans le produit prêt à la consommation. Le reste devient du gaz carbonique. On peut espérer valoriser 80% vers l’an 2000, et même plus au-delà. En effet, les matières premières des carburants de synthèse ont l’inconvénient d’avoir un rapport carbone sur hydrogène élevé. Une grande partie du carbone est consommée dans l’usine même pour produire l’hydrogène nécessaire à la synthèse et à l’élimination de certaines impuretés. On diminuera d’un quart ou d’un tiers l’émission de gaz carbonique dans la synthèse si l’on peut disposer un jour de l’hydrogène obtenu par décomposition de l’eau grâce à l’électricité nucléaire ou l’énergie solaire.

Toutes ces recherches aideront certes à maîtriser les processus qui pourraient conduire à une exagération de l’effet de serre. En étudiant, par une approche pluridisciplinaire, dans un cadre international, les conséquences climatiques des évolutions dans le secteur énergétique en cours, les chercheurs contribuent bien à inventer le futur, dans ce domaine capital des rapports de l’homme avec son environnement terrestre.

REPARTITION ET MOUVEMENTS ANNUELS DU CARBONE. D’après Bert Bullin. Université de Stockholm : Scientific American, septembre 1970

Selon certains scientifiques, « l’empoussièrement » accru de l’atmosphère lié aux activités humaines (industries, grands travaux, brûlage des savanes, etc.) jouerait contre l’effet de serre, limitant l’arrivée au sol du rayonnement solaire. On a établi une bonne corrélation depuis 1880 entre l’activité volcanique et la transparence de l’atmosphère : les grandes éruptions envoient dans la stratosphère des quantités énormes d’anhydride sulfurique, paillettes blanches qui réfléchissent vers l’espace la lumière solaire.

Les plantes émettent des aérosols de matières organiques, créant des brumes légères du genre « ligne bleue des Vosges ». Selon Lovelock, l’accroissement du gaz carbonique favoriserait la poussée des végétaux, donc la production de ces aérosols, ce qui limiterait l’accroissement de température : une véritable auto-régulation !

On ne sait pas grand-chose des variations de la puissance du soleil. Des variations mêmes faibles pourraient avoir des effets bien supérieurs à ceux du gaz carbonique.

Certains scientifiques ne voient pas l’effet de serre sous un jour apocalyptique : selon eux, l’enrichissement de l’atmosphère en gaz carbonique, favorisant la fonction chlorophyllienne, nous promet de belles récoltes. Fort bien, mais serions-nous plus heureux si la Sibérie devenait un jardin et notre pays une réplique du Sahel ?

(1) Prix Nobel 1971 de physique

(2) 33% en France, pour les raffineries d’ESSO SAF à fin 1982.

TRADUCTION

Greenhouse effect, Fossil energies, New energies

“The future cannot be predicted, but futures can be invented.” Dennis Gabor (1)

Carbon dioxide in the atmosphere tends to reduce the emission of infrared radiation from the Earth’s surface to space. If the concentration of carbon dioxide increases, the temperature at ground level must logically increase. This is the greenhouse effect. This concentration, currently at 340 parts per million, was 280 in the middle of the last century and has increased by 15% since 1900. The causes of this increase are, on the one hand, the use of fossil fuels and, on the other hand, deforestation, particularly in tropical areas, the relative shares of these two causes being still poorly known. In addition, a large part of the carbon dioxide emitted into the atmosphere is absorbed by the sea.

A doubling of the concentration of carbon dioxide in the atmosphere can be expected between the middle and the end of the next century. According to various recently developed atmospheric models, the consequences could be a general warming (1.5° to 3°C) that could reach up to 10°C in the polar regions. The climatological and socio-economic effects could then be immense: melting of polar ice, rising sea levels, persistent droughts in areas that are currently well watered, rainfall in areas that are now arid.

Catastrophic scenario? But it must first be recognized that many factors other than the carbon dioxide content of the atmosphere have an influence on the climate: since 1940, the average temperature on earth has dropped by 0.4°C, while the concentration of carbon dioxide has increased. And then, if man cannot predict the future, he can invent it! Edward David, President of Exxon Research and Engineering Co., reminded us of this during his speech at a symposium on climatology in October 1982.

To invent this future, man has the science and technology, the market as a guide, and political action at his disposal. Forecasting does not consist in extrapolating the present, but in building several plausible scenarios. Research must be undertaken with results applicable to as many of these scenarios as possible.

Exxon’s program includes very long-term studies, and this is how the Group, along with other oil companies, is addressing the problem of carbon dioxide, by participating in research on this subject. For example, the Group’s tankers have been systematically sampling air between the Gulf of Mexico and the Persian Gulf to measure carbon dioxide. Everyone agrees that a major “energy transition” has begun with the gradual shift from fossil fuels to renewable energies. This will have a major effect on carbon dioxide emissions. Already favorable factors are at play. The International Energy Agency reports that to increase the production of goods and services in the free world by one point, 16% less energy and 26% less oil is needed than 10 years ago. Exxon has cut fuel consumption at its refineries by 20% (2) (and double that by the year 2000).

David accepts as reasonable three hypotheses regarding the factors that can influence the future evolution of the carbon dioxide content of the atmosphere:

- Continued economic growth, mainly in the Third World, with a doubling of the world’s population in 50 years.

- Preference given to the cheapest energy sources, sometimes using local fuel resources (e.g. agricultural and forestry waste).

- Continued dominance of liquid fuels in transport, which could lead to an industry of “synthetic fuels” from oil sands, oil shale and coal by the year 2000.

On the basis of an annual global increase in energy consumption of 1% per year for 50 years, mainly due to growth in the Third World, Exxon has calculated that the doubling of carbon dioxide levels in the air would occur towards the end of the 21st century, with possible climate degradation as early as 2050.

For the same amount of usable energy, the manufacture and use of synthetic fuels generate more carbon dioxide than the production and use of oil, but replacing them with additional oil would only delay the date of doubling by 5 years. These estimates do not assume any improvements in current energy-intensive production techniques, nor do they take into account the advent of the “ IT age “: these advances will help reduce carbon dioxide emissions. So there is still time for mankind to accumulate the scientific data to react before the problem becomes acute.

These views are in line with those of IIASA (International Institute for Systems Analysis). In a 1981 report this institute described the transition from fossil fuels to renewable energy, pointed out the problem of carbon dioxide, and insisted on the need for important long-term research to solve it. History shows that it takes at least half a century for a new energy source to provide 50% of the total consumption.

Exxon, in its research, works for both the short and the long term. For example, Exxon researchers are improving refinery efficiency (short term) and studying cutting-edge fractionation processes that do not use energy-consuming distillation, thus avoiding the production of carbon dioxide (long term). They have also investigated many possibilities for synthetic fuels: shale pyrogenation; direct coal liquefaction; one-step coal methanation; generation of “syngas” (a mixture of carbon monoxide and hydrogen) from coal, lignite, natural gas from regions too remote for conventional upgrading; conversion of syngas into fuels and chemicals.

Admittedly, the processes envisaged to produce synthetic fuels have proved to be much more costly than expected. This fact, combined with the stability of crude oil prices, has slowed their progress. But they need to be rethought in terms of energy consumption. Today, in these processes, only 60% of the carbon in the feedstock ends up in the product ready for consumption. The rest becomes carbon dioxide. We can hope to recover 80% by the year 2000, and even more beyond. Indeed, the raw materials for synthetic fuels have the disadvantage of having a high carbon to hydrogen ratio. A large part of the carbon is consumed in the plant itself to produce the hydrogen needed for the synthesis and the elimination of certain impurities. The emission of carbon dioxide in the synthesis process will be reduced by a quarter to a third if the hydrogen obtained by decomposing water using nuclear electricity or solar energy can one day be made available.

All this research will certainly help to control the processes that could lead to an overshooting of the greenhouse effect. By studying, through a multidisciplinary approach, in an international framework, the climatic consequences of current developments in the energy sector, researchers are making a significant contribution to inventing the future in this crucial area of man’s relationship with his earthly environment.

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According to some scientists, the increased “dust” in the atmosphere due to human activities (industries, major works, scorching of the savannah, etc.) would mitigate the greenhouse effect, limiting the arrival of solar radiation on the ground. A good correlation has been established since 1880 between volcanic activity and the transparency of the atmosphere: large eruptions send enormous quantities of sulphuric anhydride into the stratosphere, as white flakes that reflect sunlight back into space.

Plants emit aerosols of organic matter, creating light mists like the “blue line of the Vosges”. According to Lovelock, the increase in carbon dioxide would favour the growth of plants, thus the production of these aerosols, which would limit the increase in temperature: a true self-regulation!

We don’t know much about the variations in the power of the sun. Even small variations could have much greater effects than those of carbon dioxide.

Some scientists do not see the greenhouse effect in an apocalyptic light: according to them, the enrichment of the atmosphere with carbon dioxide, favoring the chlorophyll function, promises us good harvests. Alright, but would we be happier if Siberia became a garden and our country a replica of the Sahel?

(1) 1971 Nobel Prize in Physics

(2) 33% in France, for ESSO SAF refineries at the end of 1982.

ANNUAL CARBON DISTRIBUTION AND MOVEMENTS. According to Bert Bullin. University of Stockholm: Scientific American, September 1970.

Paris, le 8 décembre 2020,

Michel LEPETIT, Président de Global Warning

Je remercie J.-B. Fressoz et M. Auzanneau, qui ont inspiré ce travail ; et Y. Portz, exceptionnel bouquiniste du marché de Carantec, sans qui rien de tout cela n’aurait été possible

[1] Fressoz J.-B. & Bonneuil Ch. — L’évènement Anthropocène — Seuil — 2013

[2] Franta, B. Early oil industry knowledge of CO2 and global warming. Nature Clim Change 8, 1024–1025 (2018).

[3] Voir par exemple https://exxonknew.org ; et ses sources

[4] Dans une conférence du 26 décembre 1966 ; conférence reprise sous forme dans la revue Nature en mars 1967

[5] « (…) By 1285 London had a smog problem arising from the burning of soft coal, but our present combustion of fossil fuels threatens to change the chemistry of the globe’s atmosphere as a whole, with consequences which we are only beginning to guess.(…)” — “(…) Vers 1285, Londres avait un problème de smog dû à la combustion de la houille maigre, alors que notre combustion actuelle de ressources fossiles menace de transformer la composition chimique de la totalité de l’atmosphère du globe, avec des conséquences que l’on commence à peine à imaginer.(…) »

Voir : Lynn White — Les racines historiques de notre crise écologique, traduit par J. Grinevald, introduction de D. Bourg, PUF 2019

[6] Putnam P.C. Putnam, Energy in the Future, Van Nostrand, New York 1953(556 pages)

[7] Voir le texte de l’annexe 6–1 intitulée « The Combustion of Fossil Fuels, the Climate and Sea-Level » mise en ligne (ENERGY IN THE FUTURE) en 2014, avec cet extrait de la conclusion : « (…)Perhaps such a derangement of the CO2 cycle would lead to an increase CO2- content of the atmosphere great enough to affect the climate and cause a further rise of sea level. We do not know this. (*) We ought to know it.

(Note *) Latest experimental and theoretical calculations shows that doubling the CO2 content of the atmosphere causes surface temperatures to rise 4° F if no other changes occur. (…)”

[8] Dans la mesure du stock de numéros en notre possession.

[9] Premier colloque international sur l’aménagement du territoire et les techniques avancées — Gif-sur Yvette — 25–30 mars 1968.

M. Boiteux, PDG d’EdF et F. Braudel sont membres du Comité d’organisation du colloque ; présence de M. Guillaumat, Président d’ERAP-Elf

Actes du colloque de 5 journées- Extraits

Echanges verbatim de la première journée « Energie et ressources naturelles » présidée par M. Marcel Boiteux (à partir de la page 166 du document PDF des actes du colloque)

Les problèmes de la pollution (page 176 du document PDF)

(…) M. Gandilhon (F.). — Je reviens à ce qui a été dit en matière de pollution : devons-nous nous attacher systématiquement à ces micro-pollutions que sont les pollutions urbaines actuelles, ou, au contraire, ne devons-nous pas penser à la pollution de caractère mondial, c’est-à-dire l’augmentation du taux de gaz carbonique dans l’atmosphère tout entier qui pourrait peut-être, dans une décade ou un demi-siècle, commencer à poser des problèmes de modification globale du climat terrestre. J’ai lu certaines choses assez impressionnantes à ce titre : ce qui pourrait conduire l’humanité à ralentir la combustion des combustibles au bénéfice nucléaire, en attendant qu’il y ait une sorte de course de vitesse entre la chlorophyle et les forêts, et la combustion des combustibles.

M. Boiteux (F.). — M. Gandilhon dégage un argument en faveur des déchets nucléaires, parce qu’ils sont solides, vitrifiés et n’encombrent pas l’atmosphère de gaz carbonique, sans même parler du soufre, que la chlorophyle n’arrive pas à combattre.

(…)

M. Rotherham (Grande-Bretagne). — Il est bien connu que la plus grosse partie de la pollution qui existe dans les villes se limite aux niveaux les plus bas. (…) La question du gaz carbonique reste un problème plus complexe, et je n’ai pas l’intention de proposer de solutions, car je ne sais pas s’il est nécessaire de réduire l’émission de gaz carbonique.

(…)

M. Guillaumat (F.) — Aussi bien lorsque j’étais président de l’Électricité de France que depuis que je préside des intérêts pétroliers de l’État français, mes conclusions personnelles rejoignent celles de M. Boiteux.

Bien qu’ici nous ne regardions pas les problèmes de financement, de commercialisation et d’achat des différentes ressources, il est certain que dans les cinquante prochaines années, ces problèmes seront considérables. Pour les pays industriels qui sont importateurs d’énergie, c’est-à-dire presque toute l’Europe occidentale, le Japon et peut-être demain les États-Unis, le problème de payer son importation d’énergie se posera de telle façon que le nucléaire, dans les nations industrielles, est la seule solution pour maintenir leurs ressources à hauteur de leurs besoins.(…)

M. Boiteux (F.) — (…) Ensuite, nous avons noté que l’aspect pollution était un aspect très fondamental du problème, alors que les deux formes d’énergie suscitent à cet égard des inquiétudes, soit par l’évacuation des déchets radioactifs, soit par l’évacuation, si ce n’est du soufre que l’on saura dominer dans dix, vingt, ou je ne sais combien d’années, du moins celles du gaz carbonique, sauf secours chlorophylien.

Enfin, les aspects liés à l’approvisionnement de cette Europe qui manque de ressources fossiles et qui, par ailleurs, se doit de trouver un équilibre convenable pour ses devises.

Ceci me semble aller en faveur d’un développement très notable de l’énergie nucléaire, très notable ne voulant pas dire exclusif, et là-dessus M. Laigroz, très sagement, avait prévu dans son rapport que, malgré tout, les hydrocarbures avaient encore un bel avenir devant eux. (…)

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Michel LEPETIT

Président de Global Warning

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Histoire globale de l’énergie — Histoire de la science et de la prise de conscience climatique — Archives de la communication institutionnelle d’ESSO en France (groupe EXXON) — Revue PÉTROLE PROGRÈS : extraits des N°32 (1957) ; N°33 (1957) ; N°64 (1965) ; N°84 (1970) ; N°87 (1971) ; N°98 (1974) ; N°100 (1974). Publication intégrale de l’article « Effet de serre, Énergies fossiles, Énergies nouvelles » PÉTROLE PROGRÈS N°137 (1983) — Colloque international sur l’aménagement du territoire et les techniques avancées — Gif-sur-Yvette 25–30 mars 1968

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